Après douze ans de
collaboration, les fiançailles de SIMCA et de
CHRYSLER sont devenues mariage. La nouvelle firme,
troisième constructeur mondial, a lancé son
nom prestigieux de CHRYSLER - France au moment même
où ses trois premières voitures étaient
présentées au Salon de Paris, en automne
dernier.
S'adressant plus
particulièrement au marché français, la
gamme des Chrysler - France s'inscrit dans la lignée
des " grosses européennes ". En fait, les 160, 160 GT
et 180 font partie de la catégorie des 8 à 11
CV qui veulent concilier les divers besoins de la
conduite moderne et les goûts d'un public dans le "
vent ", telles la Ford Taunus, la Mazda 616, l'Opel Ascona
pour citer les trois autres modèles également
nouveaux venant rejoindre notamment les Renault 16 TL,
Peugeot 504, Citroën D spécial, Wolkswagen 411 L
E, Fiat 125.
Nouvelle grande Simca selon les
uns, ancienne grosse Chrysler selon les autres, la Chrysler
- France 160, 160 GT et 180 a pour elle, sans conteste
possible, une originalité qui est aussi une
réussite remarquable : son moteur. Celui-ci vaut des
performances de tout premier ordre, la plaçant
facilement sur ce point en tête de ses
concurrentes.
Mais avant d'en venir à
ces performances et aux caractéristiques des trois
voitures, il convient de les différencier entre
elles. En haut de la gamme, la 180 (10CV, cylindrée
1812 cm3, alésage 87,7) ; en version
économique : la 160 (9CV, cylindrée 1639 cm3,
alésage 83,4) ; se situant entre les deux, la 160 GT
(10CV, cylindrée 1812 cm3, alésage
87,7).
A la cylindrée
près et mis à part le système de
freinage, les trois voitures sont pourvues d'une
mécanique semblable. Leur carrosserie est la
même sauf un choix plus étendu de coloris pour
la 180. Par ailleurs en ce qui concerne la finition, la 160
et la 160 GT ne présentent pas de différence :
la 180 bénéficiant par contre d'un
équipement plus soigné.
HABITABILITE -
EQUIPEMENT
Dans les trois versions, la
carrosserie de style américain, trop prononcé
au dire de certains usagers français, est
caractérisée par un long capot et une
élégante ligne incurvée du toit qui
rejoint le coffre arrière.
Cette berline à quatre
portes offre une grande habitabilité en longueur,
largeur, hauteur. L'accès aux places avants est
facile, beaucoup moins celui de la banquette arrière
pourtant spacieuse, mais la forme des portières
sacrifiant à la ligne aérodynamique de la
voiture oblige à beaucoup se courber pour
entrer.
Les utilisateurs souhaiteraient
généralement une visibilité plus grande
allant de pair avec les caractéristiques de ce
modèle de classe. Ainsi aurait-on souhaité
peut-être des glaces latérales plus hautes, une
lunette arrière plus fonctionnelle, un pare brise de
plus grande surface ?
Mais les sièges sont
très confortables, particulièrement sur la
180, des pare brise en verre feuilleté sur la 160 -
qui existent en série sur les 160 GT et 180 - . En
option également la radio avec hauts parleurs avant
et arrière pour les trois modèles ; pour les
160 et 160 GT : le dégivrage de la lunette
arrière et les appuis - tête qui existent en
série sur la 180.
Le réglage du
siège est remarquablement simple pour le conducteur,
grâce à une barre fort bien
étudiée.
Une console sépare les
sièges avant. Elle comporte un creux faisant office
de vide poche et supporte le frein à main et le
levier de changement de vitesse dont la base est
soigneusement gainée. On remarque enfin la vaste
boîte à gant et son couvercle de tôle
qu'il faut prendre la précaution de refermer, les
poignées intérieures d'ouverture
entièrement encastrées et, seulement sur les
180, des vides poches latéraux.
Le tableau de bord ne manque
pas d'allure avec ses quatre cadrans circulaires sur la 180
(compte tours ; indicateurs de vitesse et totalisateur ;
témoin de charge, thermomètre d'eau,
témoin de pression d'huile, témoin minimum
d'essence et jauge ; montre). La 160 n'a que trois cadrans.
Les essuie-glace et le lave-glace sont actionnés par
un levier bien conditionné placé à
droite sous le volant. L'allume cigare n'a pas
été oublié et est
complété par un petit cendrier
En dépit d'un
équipement très satisfaisant, on formule
généralement le souhait d'un effort plus grand
dans ce domaine où l'on cite volontiers la Ford
Taunus en exemple.
MOTEUR - PERFORMANCE -
CONSOMMATION
Le moteur Simca des trois
versions de la Chrysler - France est une nouveauté,
un grand succès et une création raisonnable
(quatre cylindres en ligne, culasse en alliage léger,
arbre à cames en tête commandé par
chaîne).
Outre les
caractéristiques déjà données
plus haut de ce moteur, notons que pour la 160, il
développe 80 CV DIN à 5.600 tours/minute, avec
un simple carburateur inversé et une compression de
9,2 et 97 CV DIN pour la 180 avec un carburateur double
corps et le même rapport volumétrique, au
même régime.
D'une exceptionnelle robustesse
interne, d'une véritable conception moderne, ce
moteur a le mérite non moins appréciable,
d'être facilement accessible. Les bougies, le
carburateur, la pompe à essence, l'allumeur, sont
atteints sans la moindre effort.
Il va de soi que les
performances des 160, 160 GT et 180, découlant de
leur excellent moteur, sont elles-mêmes très
bonnes. Les vitesses maximales annoncées par Chrysler
- France : 170 km/h pour les 180 et 160 GT et 155 km/heure
pour la 160, peuvent être atteintes à peu de
chose près. Elle consacrent en tout cas la 180 comme
la voiture la plus rapide et la plus nerveuse de sa
catégorie.
La 160, bien que
handicapée par un rapport poids-puissance plus
défavorable, se maintient normalement dans le sillage
de la 180, jusqu'à 120 km/h.
Les consommations, il n'y a pas
lieu de s'en étonner en moyenne 9,5 litres pour la
160 et 9,6 litres pour la 180. Une vaste réservoir de
65 litres dispense d'ailleurs de calculer au litre
près.
TRANSMISSION
La boîte de vitesse
à quatre rapports synchronisés (licence
Porsche), avec levier au plancher, est la même dans
les trois modèles, sauf que le rapport de pont de la
160, 11 X 43, est plus court que celui de la 180, 11 X 41,
d'où une vitesse inférieure à
régime égal.
De l'avis de tous les
utilisateurs, cette boîte de vitesse est bonne. Le
guidage est habituellement jugé précis et la
synchronisation satisfaisante, mais la commande quelque peu
ferme.
DIRECTION - TENUE DE
ROUTE - FREINAGE
Les trois voitures sont munies
d'une direction à crémaillère (rayon de
braquage : 5,50 mètres), dont la
démultiplication et la douceur sont adaptées
pour le mieux au type des 160/180. En outre très
précise, cette direction donne un avantage à
la Chrysler, sur toutes les concurrentes de sa
catégorie, y compris le Peugeot 504 et la
Citroën D Spécial…
On se doit, malgré tout,
de signaler un défaut mineur, à savoir le
manque de fermeté de la crémaillère
pour les manœuvres à l'arrêt.
En ce qui concerne la tenue de
route, le comportement de la Chrysler - France doit
être soigneusement observé.
Equipée de pneumatiques
de qualité, sur une route en bon état et par
temps sec, les 160, 160 GT et 180 tiennent parfaitement, aux
allures les plus rapides. Courbes et virages ne
présentent aucune difficulté. On enregistre
sur mauvaise route, le sautillement du train arrière,
sans encore risquer de perdre la stabilité, les
éventuelles amorces de lacet se résorbant
pratiquement, sans intervenir.
Par contre, sous la pluie, il
devient indispensable de ralentir sensiblement, faute de
quoi, le manque d'adhérence des roues arrière
deviendrait inévitable. On connaissait
déjà cette tendance chez la Simca 1501.
Le système de freinage
donne entière satisfaction. Il se compose de quatre
freins à disque et servo-frein. Disque à
l'avant et tambour à l'arrière sur la 160 ;
disque sur les quatre roues sur la 160 GT et la 180, ces
deux dernières disposant en outre, du servo-frein
à dépression.
CONFORT
S'agissant de la suspension, on
ne peut écarter le débat suscité par la
première née de Chrysler-France. En France,
nombreux sont ceux qui estiment que son pont arrière,
dit " banjo ", est tellement classique, qu'il est
passé de mode. Une voiture des temps modernes ne
saurait se contenter, dit-on, d'un essieu rigide avec
différentiel non suspendu. A cela, les techniciens
répondent que, d'une part, Chrysler-France a
considéré l'aspect économique du
système et que, d'autre part, bien des
Européens ne s'offusquent pas de trouver ce
même retard sur les Fiat 125 et les Opel Rekord, pour
ne citer que ces deux voitures renommées.
On retiendra l'avantage de la
voiture en charge par rapport à la vide ; dans ce
cas, le confort est meilleur et l'amortissement
suffisant.
En marge de la suspension, il
faut rendre justice aux Chrysler - France, pour leur
excellente insonorisation. Même à haut
régime, le moteur reste silencieux et sans
vibration.
Conclusion
:
Aucune voiture de grande
diffusion, de la classe des nouvelles européennes
8/11 CV, ne saurait, au prix des 160/180 Chrysler, offrir
tout à la fois, et au mieux de la perfection,
c'est-à-dire confort, habitabilité,
performances, tenue de route etc… Certes, il faut exiger,
mais il faut choisir.
Chrysler- France a choisi pour
horizon, la grande route, l'autoroute, les hautes
performances, sans consommation exagérée.
Chrysler a choisi également un bon confort, une
habitabilité agréable, une excellente tenue
à grande vitesse sur route sèche…
A coté de telles
qualités, le manque d'originalité, voir la
relative modestie de l'aménagement intérieur
et l'inconvénient d'un essieu arrière rigide,
ne pèsent guère lourd dans la balance.
Il reste donc à
souhaiter à cette grande routière, bonne
chance… et que les utilisateurs français
l'apprécient enfin à sa juste valeur,
après avoir tarder à la
découvrir.
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